J’ai eu la chance le lundi 10 août 2015 de m’entretenir en rencontre privée avec nul autre que notre cher Premier Ministre, ministre responsable de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et député de Roberval, M. Philippe Couillard. Perdue dans tous ces titres, la première question que je lui ai posée fût : «Désolée pour l’ignorance, mais comme je n’ai pas l’habitude de ce genre de rencontre, en quels termes dois-je m’adresser à vous ce matin?» Et la réponse fut : « « Mademoiselle, adressez-vous à moi comme si vous parliez a un inconnu (ce qui est le cas) qui s’intéresse à votre situation.» En compagnie de la charmante Joany Tremblay (relève agricole de St-Prime), nous avons donc exposé à M. Couillard les préoccupations et la situation de la relève régionale et provinciale concernant principalement « l’accaparement des terres » et la gestion de l’offre.
L’accès à la terre
Sur l’accaparement des terres, le point culminant a été lorsque M. Couillard m’a demandé pourquoi cela ne serait pas intéressant pour moi, relève agricole, de vendre mes terres à PANGEA, pour ne pas les nommer, et de continuer en location… Je lui ai répondu que si je vendais à PANGEA, ils ne voudraient pas de moi dans leur tableau. Ils prendront les terres et les incorporeront dans leur société d’opération agricole (SOA) la plus proche. Je n’aurai plus qu’à prendre le «magot» et à m’exiler à Montréal! Malheureusement, lorsque PANGEA «aide» une seule relève à s’établir, ils peuvent faire disparaître une dizaine d’occasions de transfert ou de démarrage! Du même coup, une dizaine de familles dynamisant le milieu rural façonnant nos si beaux paysages dont nous faisons la publicité à l’étranger pour attirer les touristes. J’ai eu l’impression à ce moment qu’il avait perdu l’impression que les SOA représentaient la solution pour l’avenir de l’agriculture. Du moins, qu’il venait de comprendre qu’il y a un envers de médaille bien moins brillant aux soi-disant bienfaits de ce type de partenariat.
La défense de la gestion de l’offre
Pour la gestion de l’offre, Joany et moi avions devant nous une personne convaincue que ce système était bon et qu’il fallait le défendre. Mais politiquement parlant, il ne semblait pas convaincu qu’on allait la maintenir intégralement comme nous le souhaitons. Il nous a aussi rassurées à plusieurs reprises sur le fait qu’il n’y avait pas seulement ce litige pour conclure l’accord et que d’autres puissances avaient de bien plus grandes concessions difficiles à faire. De notre côté, nous lui avons assuré que la gestion de l’offre était essentielle à la pérennité de notre industrie laitière régionale, autant au point de vue production que transformation. Il nous a également admis qu’il venait tout juste de prendre en considération le facteur climat pour concurrencer les autres pays sur un même marché et il semblait être encore en recherche d’arguments politiques pour la gestion de l’offre. Nous lui avons alors parlé de réciprocité du point de vue des réglementations environnementales et d’innocuité alimentaire (toujours gagnant chez les électeurs).
Finalement, pour attacher les deux sujets, nous avons conclu en mettant l’accent sur le fait que ce sont deux enjeux majeurs qui feront en sorte que l’on garde notre «Agri-Culture» familiale, dynamique et basée sur l’entreprenariat. M. Couillard nous d’ailleurs assuré qu’il tenait au maintien de la ferme familiale au Québec et qu’elle jouait un rôle important.
Nous espérons que M. Couillard se souviendra de ces deux jeunes agricultrices et de leurs messages…
Michèle Lalancette
Présidente du Conseil régional des jeunes agriculteurs