Le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, monsieur André Lamontagne, a pris part au 3e Rendez-vous des décideurs de la FRAQ présenté par Financement agricole Canada, mais dans une formule beaucoup plus éclatée qu’à l’habitude. S’il est d’usage que le ministre soit présent et réponde aux questions des relèves, cette fois c’est lui qui a questionné les relèves. En effet, monsieur le ministre s’est prêté au jeu de la consultation en abordant trois grandes thématiques avec les relèves, soit les différents modèles agricoles, l’accès aux terres et la vision de l’avenir de l’agriculture.

Les différents modèles de la relève agricole

Les relèves présentes ont notamment abordé les besoins criants concernant l’adaptabilité des programmes aux nouvelles réalités des relèves agricoles afin de favoriser l’émergence de nouveaux modèles non traditionnels comme les coopératives, les productions de niche et le travail à l’extérieur. Plusieurs ont par ailleurs rappelé qu’il est difficile de valoriser différents types de modèles quand le mode de financement des programmes fonctionne toujours avec la même logique depuis 50 ans et que les critères des programmes encouragent peu la créativité entrepreneuriale. Par contre, tous s’entendent pour davantage soutenir les entreprises qui mettent à l’avant la mise en marché de proximité.

« Je ne pense pas que tous les modèles de relève sont considérés. Programmes, subventions, assurances… aussitôt que tu es une coop ou que tes produits sont nichés, tu peux facilement tomber dans les craques et te voir refuser le même traitement que les autres. Ça prend un plus plus de flexibilité. » – Un membre de la relève agricole

« Dans les modèles de relève, il ne faut pas oublier tous les acteurs différents entre la ferme et le garde-manger du consommateur. L’abattoir le plus proche est à 3h30 de route et le prochain est à Montréal, c’est 9h de route et il est hors de question de faire subir cela à mes animaux. Ce n’est pas seulement l’agriculteur.trice, nos installations on y tient et sans elles on ne pourrait pas plus survivre. Il est important de penser à elles aussi. On veut faire de la mise en marché de proximité, mais pour faire la transformation nous devons sortir de la région.» – Une membre de la relève agricole

L’accès aux terres

L’accès aux terres fut certainement le sujet qui fut le plus grandement discuté avec le ministre, où la valorisation des modèles locatifs à long terme s’est confrontée aux besoins des relèves d’être propriétaire de leur terre afin de pouvoir augmenter leur capacité d’emprunt. Bref, de grandes discussions qui augurent de grands débats dans le cadre des consultations et territoires à venir.

« Il y a du bon et du mauvais à la location à long terme des terres. Moi, la moitié de mes terres sont des locations et c’est difficile d’imaginer avoir une entreprise pérenne. Ces terres-là, on y investie beaucoup de temps et d’argent de nos poches pour augmenter leur rendement alors qu’elles ne sont pas à nous. Si un jour j’ai la chance que ces terres soient en vente, qui sait si j’aurai les moyens pour les acheter. C’est encore des sous à débourser de ma poche. Un acheteur étranger pourrait aussi se pointer avec une offre impossible à refuser, ou encore les propriétaires pourraient refuser de me relouer les terres à échéances du contrat. C’est beaucoup d’incertitudes. » – Un membre de la relève agricole

La vision de la relève agricole

Finalement c’est sur l’avenir de l’agriculture que s’est achevé la discussion avec le ministre, une question ouverte et très large, cependant beaucoup de relèves tombent d’accord sur un point : dans le contexte actuel il est difficile pour plusieurs d’entre eux d’avoir une vision à long terme alors que les entreprises peinent à survivre.

« Je suis chanceuse, j’ai un bon noyau d’employés, mais à long terme comment allons-nous faire pour en trouver de nouveaux avec la pénurie de main-d’œuvre et toutes les hausses ? Il ne faut pas oublier notre vie familiale, notre vie personnelle et notre santé mentale. On souhaites avoir notre samedi de congé comme tout le monde. On ne pourra pas tout faire nous-mêmes. » – Une membre de la relève agricole

« On ne peut pas se projeter dans 30 ans si on ne sait pas où nous serons dans 5 ans, 1 an ou 6 mois. On ne peut pas prévoir une sécheresse, des inondations, des gèles. On ne peut pas savoir où seront rendu les prix et les taux d’intérêts. Ça prend des programmes qui nous soutiendrons maintenant et durablement. Des programmes qui ne dépendront pas des variations des facteurs externes et qui nous donnera une stabilité financière. » – Un membre de la relève agricole

André Lamontagne a fait preuve d’une grande générosité en restant une peu plus d’une heure trente avec les relèves et a démontré beaucoup d’écoute. Une formule certainement à refaire dans les prochaines années qui permet d’augmenter les échanges et de générer davantage d’idées innovantes. La FRAQ remercie M. Lamontagne de sa visite.