On entend de plus en plus parler de transfert non apparenté dans le milieu agricole québécois. Normal, 14 % des transferts se sont fait hors cadre familial, selon le plus récent portrait de la relève agricole réalisé par le MAPAQ. Mais qui sont ces jeunes qui optent pour le transfert non apparenté?

Ils peuvent être neveux/nièces, petits-enfants, cousins/cousines, d’un producteur agricole, ou encore être le conjoint de fait d’un enfant de producteur. Ils peuvent aussi être citadins ou ruraux non originaires d’un milieu agricole, ou encore enfant d’agriculteur qui démarre dans une autre production que celle pratiquée par la famille. Bien que vivre de l’agriculture constitue pour la majorité le rêve d’une vie, près de 50 % de ce genre de transfert se soldent par un échec…

Nous explorerons, dans un premier temps, les raisons qui expliquent ces échecs dans 50 % des cas et ensuite, à l’inverse, ce qui apparaît comme des facteurs de réussite pour l’autre 50 % des projets d’établissement par transfert.

Le premier frein majeur est celui d’avoir un bagage de départ qui n’est pas suffisant. On parle ici de budget, de formation et d’expérience. Une crise du lancement peut également survenir. Il peut s’agir d’un manque d’analyse, de planification, d’un plan d’affaires flou. Une crise de croissance peut aussi mettre fin au processus d’établissement : manque de maîtrise de la production, décision stratégique ou opérationnelle déficiente qui mettra en péril la survie de l’entreprise, ou encore une dynamique difficile entre les co-exploitants. Le dernier frein est composé d’un ensemble de conséquences qui peuvent survenir et qui deviennent rapidement hors de contrôle. Cela peut être le surendettement, une pression sur l’entreprise qui empêche de faire face aux échéances et aux engagements, ou bien un épuisement professionnel.

À l’inverse, plusieurs facteurs apparaissent comme des facteurs de réussite pour l’établissement par transfert non apparenté. Le premier est central à tout projet agricole, il s’agit du facteur humain. Communication, entraide, ouverture, honnêteté… bref, avoir une bonne dynamique entre le cédant et la relève. Dans bien des cas, la présence d’un guide externe dans le transfert et faire appel au soutien professionnel (conseiller, fiscaliste, etc.) sont un gage de meilleures chances de succès. Le soutien moral, financier et/ou physique de la famille est également bénéfique pour la relève. L’état d’esprit dans lequel se situe le cédant est aussi à prendre en compte. Un cédant ayant une volonté profonde de léguer son savoir et son patrimoine à une relève augmente les chances de réussite.

Que ce soit au pré-démarrage ou en phase de démarrage, d’autres aspects pourront faciliter le transfert. Au pré-démarrage, il s’agit de la capacité de la relève à chercher du financement, des subventions et des ressources. Le choix de la région où s’établir doit aussi être fait judicieusement, en fonction de la famille, du réseau, de la production et du marché. En phase de démarrage, les qualités de gestionnaires, la maîtrise de la production, la mise en place d’une stratégie de réussite, la capacité d’ajustement sont autant d’aspects qui influenceront la réussite du projet. On note également que les jeunes qui sont impliqués dans un réseau professionnel ou social augmentent leurs chances, puisqu’ils ont facilement accès à de l’information pertinente et peuvent bénéficier du réseautage professionnel.

Vous croyez avoir ce qu’il faut pour vous lancer dans l’aventure du transfert non familial? Votre prochaine étape sera probablement de partir à la chasse au cédant! Pour trouver chaussure à votre pied, quelques petits conseils… Tout d’abord, manifestez-vous! Faites le tour de votre réseau, allez voir directement des producteurs que vous connaissez, contactez des directeurs de compte dans des institutions financières. Ils sont en lien avec des cédants. Parlez aux intervenants du milieu (CRÉA, syndicat régional de relève, groupe local de relève, meunerie, agronomes, conseillers XYZ). Et surtout, gardez en tête que la prochaine étape sera de démontrer que vous avez un plan de financement solide. Faites des projections réalistes, quitte à avoir plusieurs scénarios. Faites-vous aider à monter votre dossier, maîtrisez-le sur le bout des doigts et pensez à avoir une mise de fonds. Même si elle n’est pas énorme, cela démontrera votre sérieux et votre capacité à économiser et à gérer vos finances.

 

Marie-Eve Arbour

 

*Études de cas de transferts non apparentés :

– Ferme Les Cochons du Roy
Ferme Marécage
Érablière Sucre & Monts